Faut-il faire confiance aux élus locaux ?

 

Deux faits dans l’actualité de cette rentrée éclaire le débat à la veille du nouvel acte de décentralisation en préparation. D’abord, un singulier comité interministériel consacré à la seule ville de Marseille à l’issue duquel le chef du gouvernement a prononcé ces fortes paroles : « Nous sommes réunis pour définir la stratégie pour l’agglomération marseillaise » avant d’ajouter que « l’équipe préfectorale sera renforcée, avec la création d’un poste de préfet chargé de la stratégie de l’agglomération. » Ensuite, une toute autre déclaration qu’on doit au président du Sénat, Jean-Pierre Bel, qui a proposé à l’occasion d’une rencontre départementale des États généraux de la démocratie territoriale à Bourg-lès-Valence  (Drôme), que les élus locaux organisent eux-mêmes la clarification des compétences sur leur territoire dans le cadre d’un « pacte de gouvernance territorial ».

D’un côté, le président du Sénat invite à faire confiance aux élus locaux pour rationaliser l’action publique locale. Pragmatique, Jean-Pierre Bel plaide pour le maintien de tous les échelons de collectivités territoriales, qualifiant la proposition de supprimer un de ces échelons de « fausse-bonne idée ». Ecoutons les propos du président du Sénat : « Il faut faire confiance à l’intelligence des territoires (…) Il faut donc mettre en place des instances de coordination des différents échelons territoriaux pour organiser la clarification des compétences à travers ce que je qualifierais de «pacte de gouvernance territorial».

Il pourrait être conclu pour la durée du mandat. Il constituerait le cadre d’intervention et contiendrait les grands axes de l’action de toutes les collectivités dans l’espace régional.
Les partenariats, les mutualisations de moyens y figureraient au service d’un projet de territoire cohérent et ambitieux dont les coûts seraient ainsi mieux maîtrisés. Cette voie, celle du contrat plutôt que la description impossible, car toujours incomplète, des compétences dévolues à chaque niveau, permettait de répondre au besoin légitime de lisibilité de l’action publique locale. »

De l’autre côté, le Premier ministre, lors du conseil interministériel auquel participaient quinze ministres, suite aux carences de sécurité dans la Cité phocéenne, compétence régalienne de l’Etat, apporte une réponse institutionnelle. Il faut lire le relevé de conclusions du Conseil interministériel : « »L’agglomération marseillaise qui est divisée aujourd’hui en 6 structures (Marseille Provence Méditerranée, CA Pays d’Aubagne, CA du Pays d’Aix, CA du Pays de Martigues, CA de Salon-Etang de Berre, et SAN Ouest-Provence -Istres-) doit cheminer vers la solution de la métropole. L’inspiration doit être celle de la métropole, mais en tenant compte de la diversité et de la complexité de ce territoire, pour préserver les services et les liens de proximité, et respecter les identités locales. Une seule agglomération, mais plusieurs pôles. Compétences envisageables pour cette métropole : transports urbains, environnement, développement économique, enseignement supérieur, rénovation urbaine. » Le gouvernement Ayrault fixe la feuille de route.

Tous les élus locaux des Bouches du Rhône se sont émus de la méthode du Premier ministre. Jean-Marc Ayrault est à Marseille pour deux jours en ce début de semaine pour leur expliquer le bien fondé de ses décisions. Imagine-t-on son prédécesseur François Fillon réunissant un comité interministériel pour dire au maire de Nantes comment organiser sa métropole et avec quel périmètre ? Certes, on me répondra que Marseille n’est pas Nantes, que les problèmes de sécurité doivent être traités par une stratégie de développement qui déborde largement les seules questions de sécurité, de police et de justice. Mais pourquoi le faire rue de Varenne à l’Hôtel Matignon avant d’en débattre quelques jours plus tard avec les élus de l’aire urbaine marseillaise. Pour justifier la méthode du Premier ministre, quelques esprits aiguisés ajouteront quelques mots condescendants sur le personnel politique des Bouches du Rhône et sur les mœurs politiques locales. On rappellera que le Premier ministre a pris soin de préciser que « le destin de l’agglomération marseillaise est une question d’intérêt national ». On dira bien des choses pour justifier ce qui reste un acte de défiance vis à vis des élus du territoire de la deuxième ville de France.

 

 

 

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