La TVA sur les billets de cinéma va être ramenée au taux réduit de 5,5 % au 1er janvier prochain quand celle des transports publics, des cantines ou du traitement des déchets passera de 7% à 10 %. Est-ce tenable ? Après les récents renoncements gouvernementaux sur les nouveautés fiscales de la loi de finances pour 2014, les élus locaux repartent à l’assaut contre le passage de la TVA à 10 % pour une série de services publics essentiels. Si le gouvernement recule sur la fiscalité de l’épargne, l’écotaxe ou l’EBE, comment peut-il maintenir la hausse de la TVA sur des services essentiels comme les transports publics ou la collecte des déchets ? Il y a quelques jours, le comité directeur de l’Association des maires de France (AMF) s’est inquiété des évolutions du taux de TVA. Les maires font remarquer que le taux applicable au service public des déchets ménagers passera de 7 % à 10 % au 1er janvier 2014 alors qu’il a déjà été augmenté, en 2012, de 5,5 % à 7 %. « Cette nouvelle hausse, qui aboutirait à un quasi-doublement de la charge de TVA, se traduira inéluctablement par une augmentation du coût du service pour les habitants ». L’AMF demande également que le bénéfice du taux réduit ne soit pas remis en cause pour les cantines scolaires. Si la fourniture de repas bénéficie d’une exonération de TVA lorsqu’elle est faite directement par la commune ou l’EPCI, elle relève actuellement du taux de 5,5 % lorsqu’elle est effectuée par une entreprise délégataire.
Pour la collecte et le traitement les déchets, le passage au taux de 10 % de TVA est évalué à 210 millions d’euros sur les ménage. Les déchets ménagers coûtent déjà 7 milliards d’euros aux Français, soit plus de 100 euros par habitant. Réunis en congrès national à Bastia le 17 octobre, les élus d’AMORCE (association nationale des collectivités territoriales et des professionnels pour une gestion locale des déchets, de l’énergie et des réseaux de chaleur) ont voté une motion exprimant « leur colère et leur exaspération face à une mesure fiscale anti-écologique, antisociale et anti-économique qui va impacter de plein fouet la taxe ou la redevance d’enlèvement des ordures ménagères et donc le pouvoir d’achat des ménages ».
La grande fragilité commerciale des transports publics
Du côté des transports publics, les élus du GART (Groupement des autorités responsables de transport) et les opérateurs du transport public regroupés au sein de l’UTP (Union des transports publics) ont fait leurs comptes. En 2012, le taux de TVA pour les transports publics est déjà passé de 5,5 % à 7 %, soit un montant de 84 millions d’euros (dont 18 millions pour les réseaux de province). La hausse annoncée du taux de 7 à 10 % pour 2014 se chiffrerait à 168 millions d’euros supplémentaires (dont 36 millions pour les réseaux de province). Les responsables de l’UTP font remarquer qu’au Danemark, en Slovaquie et au Royaume-Uni, il n’y a pas de TVA sur les transports publics ou bien ils en sont exonérés. En Belgique, au Portugal et en Suède, le taux de TVA est de 6 %. En Allemagne, il est de 7 %. Cette augmentation inquiète d’autant plus les opérateurs que leur ratio R/D (recettes commerciales/dépenses d’exploitation) ne cesse de se dégrader. Il est passé de 39 % en 2002 à 31,5 % en 2012. Cette dégradation s’explique simplement : la demande de transport croît plus vite que les recettes. Les autorités organisatrices de transport public urbain, responsables des tarifs, comptent essentiellement sur le versement transport payé par les entreprises pour financer le fonctionnement de leurs réseaux. Or, aujourd’hui, 50 % des déplacements sont autres que les trajets domicile-travail et domicile-école, les horaires de service se sont élargis. D’autre part, l’offre de transport s’est étendue au rythme des périmètres de transport urbain (PTU).
L’UTP a calculé qu’entre 2002 à 2012, les tarifs des transports routiers de voyageurs ont baissé de 4,1% alors que, dans le même temps, les prix des autres services publics marchands (cantine, distribution d’eau, électricité, gaz et enlèvement des ordures ménagères) ont augmenté. Leurs hausses tarifaires oscillent entre 22,5 % et 66 %. Ainsi, le tarif de l’enlèvement des ordures ménagères a augmenté de 66 % et celui de la distribution d’énergie de 56,6 %. La distribution d’eau et la cantine ont vu leur tarif respectif croître de 32,3 % et de 22,5 %.