Ras le bol fiscal : risque de contagion pour les impôts locaux

 

De plus en plus de contribuables paient plus d’impôts locaux que d’impôt sur le revenu. Ajoutez-y la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ainsi qu’une série de prélèvements divers et la désormais célèbre formule de Pierre Moscovici sur le « ras le bol fiscal des Français » va obérer l’évolution de toute la fiscalité locale pour les prochaines années. Cela tombe au plus mauvais moment quand la baisse des dotations est enclenchée et  s’annonce durable. En réponse à une question d’un parlementaire qui lui demandait si la ponction sur les collectivités serait « suspendue en cas de retour à meilleure fortune » après 2015, la très discrète ministre déléguée à la décentralisation, Anne-Marie Escoffier a indiqué dans une habile litote qu’ « aujourd’hui, dire que l’Etat s’y engage ne serait pas très raisonnable ». Au même moment, le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, Christian Eckert pense encore que « la réduction de 1,5 milliard d’euros des concours de l’État  ne se traduira pas nécessairement par une réduction à due concurrence  des dépenses locales (…) : en vertu du principe constitutionnel de libre  administration, les collectivités territoriales, qui disposent d’un  pouvoir fiscal – notamment les communes et intercommunalités – auront  toujours la possibilité d’accroître la pression fiscale pour reconstituer leurs ressources ou s’endetter davantage pour financer  des investissements », comme il l’écrit dans le rapport spécial qui accompagne le projet de loi de finances pour 2014. Cynisme ? On sait bien que les vases communicants entre fiscalité nationale et fiscalité locale ne fonctionnent plus, car au final il n’y a qu’un même contribuable qui n’en peut mais.

Un récent rapport de l’Union nationale de la propriété immobilière (UNPI) montre que la taxe foncière a augmenté de 21% en cinq ans, deux fois et demie plus que l’inflation entre 2007 et 2012. En 2012, en moyenne nationale le taux de taxe foncière s’établissait à 36,4% et même de 40,3 % dans les cinquante plus grandes villes de France. L’actuelle révision des bases des valeurs locatives qui commence ne va pas dissiper l’inquiétude des contribuables. Dans ce type de débat, on entend uniquement les perdants de la réforme qui vont devoir payer davantage et jamais les gagnants qui resteront silencieux. Dans l’immédiat, les augmentations programmées au 1er janvier prochain du taux de TVA sur les transports publics, les cantines ou le traitement des déchets n’arrangent rien. L’association Amorce rappelait récemment que pour la  collecte et le traitement les déchets, le passage au taux de 10 % de TVA est évalué à 210 millions d’euros sur les ménages. Les déchets ménagers coûtent déjà 7 milliards d’euros aux Français, soit plus de 100 euros par habitant

Dans ce climat d’overdose fiscale, de plus en plus de candidats déclarés aux prochaines élections municipales, font de la pause fiscale – voire de la baisse des impôts locaux – leur principal argument de campagne. Ils prennent des risques car l’évolution actuelle de la dépense publique locale est très difficile à contenir sous l’effet conjugué de l’évolution naturelle des dépenses contraintes d’investissement (maintenance des équipements vieillissants, réponse aux besoins de la population qui continue à augmenter) et dépenses de fonctionnement, essentiellement des dépenses de personnel qui progressent  mécaniquement avec le fameux glissement vieillesse travail des fonctionnaires. Le président du Comité des finances locales, André Laignel, avait théorisé il y a déjà cinq ans la “théorie du garrot“ qui consiste pour l’Etat à asphyxier les collectivités locales pour faire baisser la dépense. Aujourd’hui, il craint tout simplement le risque d’une panne générale de l’investissement local et d’un abaissement de la qualité des services publics locaux. Les départements ont déjà baissé leur niveau d’investissement en étalant notamment les dépenses d’entretien de la voirie départementale. Le bloc communal (communes et intercommunalités) porte encore l’essentiel de l’effort d’investissement dont la baisse est inévitable, au grand dam du tissu économique local. La Fédération nationale des travaux publics (FNTP) a tiré le signal d’alarme. Ajoutons à cela le dernier procès en date fait aux contrats de partenariat public-privé à l’occasion de l’éco-taxe et tous les ingrédients d’une crise durable sont réunis à la veille du prochain cycle municipal qui s’ouvrira en mars prochain.

 

 

 

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