Lisez Davezies pour comprendre les fragilités du développement local

C’est le livre événement de la rentrée pour ceux qui s’intéressent aux politiques publiques territorialisées. Dans son dernier ouvrage « La crise qui vient : la nouvelle fracture territoriale » (1), l’économiste Laurent Davezies (2) se fait imprécateur pour nous dire que le fléchissement de dépenses publiques et sociales va avoir un impact fort sur l’équilibre des territoires, surtout dans les territoires très nombreux qui dépendent des emplois publics. « Depuis dix ans, dans 121 zones d’emploi (soit un tiers d’entre elles), l’emploi public a davantage progressé que l’emploi privé et a masqué les effets de la crise », note Laurent Davezies. Durant les grandes crises antérieures (1973, 1983, 1993), les aides publiques avaient permis un apparent développement. Les amortisseurs étaient plus puissants que les chocs, ce n’est plus le cas depuis 2008.

Une ère s’achève : celle de la croissance et du développement des territoires suburbains, fondée sur la consommation (elle-même financée par les déficits publics et l’endettement). De plus en plus, notre société sera assise sur une croissance faible, le sevrage de la dépense publique et la restriction du crédit. L’énergie chère et la crise de l’économie résidentielle laissent prévoir un retour à la production et aux métropoles. L’universitaire nous décrit des quatre France qui prennent forme sous nos yeux : un France productive, concentrée dans les métropoles (36 % de la population), une France non productive, non marchande et pourtant dynamique, à l’ouest d’une ligne Cherbourg-Nice qui vit de l’économie résidentielle et des emplois publics (44 %), une France productive, marchande, en difficulté, au nord (8 %)  et une France non productive, non marchande et en difficulté, frappée par le déclin industriel et dépendant des revenus sociaux (12 %).

À partir de là, Laurent Davezies, chiffres à l’appui,  prophétise une rupture historique. Nous allons connaître une remétropolisation : « l’avenir de la compétitivité des pays industriels se trouverait donc dans des grandes villes toujours plus denses et fluides, et de moins en moins dans des territoires périphériques et diffus. La prophétie semble implacable : la réduction des principales ressources de ces territoires, non marchandes, va encore aggraver ce déficit. »

(1) Editions du Seuil. Collection : La république des idées. 111 pages, 11,80 euros. ISBN-10: 2021086453

(2) Laurent Davezies est professeur à l’université Paris-Est Créteil Val-de-Marne (UPEC), en poste à l’Institut d’urbanisme de Paris. Depuis octobre 2011, il est professeur du Cnam. Il a développé recherches et expertises dans le domaine du développement territorial et de l’économie des territoires. Il a notamment publié récemment deux ouvrages: La république et ses territoires, la circulation invisible des richesses (en 2008 au Seuil) et Repenser le développement local (avec Magali Talandier, en 2009, aux Editions du PUCA).

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