Raymond Couderc, sénateur-maire de Béziers, a annoncé l’ouverture dès la rentrée 2013 d’une antenne du centre universitaire privé Fernando-Pessoa, qui proposera dans sa ville, à la rentrée prochaine, cinq formations : médecine dentaire, orthophonie, physiothérapie, architecture et urbanisme, sciences humaines et sociales. 190 étudiants sont prévus dès la 1re année, « 600 environ dans deux à trois ans », selon l’élu biterrois. Une formation de médecine est envisagée dans quelques années. Le centre universitaire privé Fernando-Pessoa est déjà implanté à Toulon et délivre des diplômes portugais reconnu par l’Europe, créant une polémique avec certains syndicats d’universitaires français et la plus grande réserve de la ministre française de l’enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso.
Béziers compte déjà 2.500 étudiants. Les nouveaux élèves seront accueillis dans les locaux d’un ancien IUT. Le maire fait remarquer que les diplômes délivrés par le centre Fernando-Pessoa sont portugais, « mais reconnu par l’Europe, ce qui permet d’exercer sa profession sur le sol français ». Pour Raymond Couderc cette implantation permettra de garder en France des étudiants qui aujourd’hui « s’exilent en Belgique, en Allemagne voire en Roumanie, pour ensuite s’installer en France. Autant qu’ils se puissent se former sur notre territoire », ajoute-t-il. Cette implantation montre les limites du système français de numerus clausus pour les formations médicales et paramédicales. Pour les partisans de la future antenne universitaire, c’est aussi une réponse au déficit de professionnels de santé et à l’apparition des déserts médicaux dans notre pays. Enfin, cela renforce l’attractivité de Béziers et consolide le pôle de formation de cette ville de 71.000 habitants.
Lundi dernier, 25 mars, la séance du conseil municipal de Béziers a été animée. Le leader de l’opposition socialiste Pierre Callamand, s’est déclaré opposé au projet. Ce médecin, chef du service pédiatrie à l’hôpital de Béziers, a demandé solennellement au maire de « ne pas poursuivre dans la voie du soutien à ce projet » Il a rappelé que la formation publique française « évite une sélection par l’argent ». Adjoint au maire de Béziers, député UMP, et lui aussi médecin hospitalier, Elie Aboud assume cette installation : « Aujourd’hui, 20 à 25% de praticiens sur le sol français sont qualifiés avec un diplôme européen ou hors communauté européenne. En d’autres termes, l’étudiant français part pour trois fois plus cher étudier en Espagne, en Belgique ou au Portugal et revient en France pour exercer. Tout le monde se taisait car le problème ne se trouvait pas sous nos yeux. Cette université dit juste aux étudiants ayant raté leur 1ere année : « ne partez pas ! »
À la demande de la ministre de l’Enseignement supérieur, le recteur de l’Académie de Montpellier, Christian Philip, a émis un avis défavorable à l’installation du centre universitaire portugais à Béziers. Dans un communiqué le 22 février, la ministre Geneviève Fioraso, rappellait qu’elle a déjà pris position dans le même contexte à Toulon en décembre dernier : « si, malgré cet avis négatif émis, cette installation était confirmée, la ministre demandera au recteur de signaler les faits auprès du procureur de la République, comme cela avait été fait, auprès du procureur de la République de Toulon à l’occasion de l’installation d’une antenne française de l’Université Fernando Pessoa. » En réalité, la seule faille repérée par le ministère lors de l’implantation de l’antenne toulonnaise de Fernando-Pessoa était utilisation jugée abusive du mot « université » et le défaut de demande d’accord préalable. Tout cela ressemble à un baroud d’honneur car la ministre ne peut pas interdire ces formations. Pour respecter la législation, les étudiants feront leurs stages pratiques au Portugal et auront donc un diplôme qui ne sera pas délivré en France. Les diplômes délivrés seront portugais, donc européens et valables en France. Les responsables français de l’antenne de Fernando-Pessoa ont déjà fait savoir qu’ils étaient prêts à renoncer au nom « université » pour s’appeler tout simplement « universidade ». Et si le gouvernement français persistait dans ces poursuites, ils n’hésiteront pas à saisir la Cour de justice des communautés européennes pour discrimination. Toulon et Béziers pourraient faire des émules dans les villes françaises avec d’autres universités européennes.