Choc de complexité

complexité

Mesure emblématique du choc de simplification et de la modernisation administrative, la règle du “silence vaut acceptation“ est en train de devenir un cauchemar pour les citoyens. Depuis sa mise en application le 12 novembre 2014, un an après le vote de la loi, les exceptions ne cessent de se multiplier, bien au delà des restrictions qui avaient été légitimement prévues par le législateur. Le nouveau principe, simple en apparence, institue la règle selon laquelle une demande adressée aux administrations publiques restée sans réponse au bout de deux mois est considérée comme acceptée. Cette nouvelle règle est vertueuse puisqu’elle oblige les administrations à apporter une réponse en cas de blocage et a pour but d’éviter l’enlisement des décisions dans le silence administratif. Hélas, c’est une telle révolution culturelle que chaque administration trouve de bonnes raisons pour justifier des exceptions au principe.

Bruno Martin, avocat associé au Cabinet Courtois-Lebel, a fait le compte des exceptions : elles sont des centaines… des milliers. “Le bilan est consternant : sur plus de 3.600 procédures nécessitant une demande d’autorisation auprès de l’administration, seulement un tiers d’entre elles (1.200) se voient appliquer le nouveau principe de l’acceptation tacite par l’administration et dans 730 cas seulement le délai de deux mois voulu par le législateur a été maintenu“, explique ce juriste dans une note diffusée par le Cercle des Echos. Par décret, les administrations centrales ont obtenu de modifier le délai de deux mois pour en fixer de plus longs. Pour faire face à cette nouvelle complexité, savez-vous qu’il existe un guide de plus de 100 pages de tableaux (Légifrance, liste des procédures pour lesquelles le silence gardé par l’administration sur une demande vaut accord) qui donne la liste des textes, des autorités compétentes et des délais ? “Finalement, vu le nombre des exceptions ainsi que des exceptions aux exceptions, le nouveau dispositif est nettement plus compliqué qu’avant“, conclut Bruno Martin.

Faut-il reprocher aux administrations de faire de la résistance ? Il n’y a là rien que de bien naturel. Le reproche doit surtout être adressé aux responsables politiques, à l’exécutif qui avait annoncé la réforme à grand renfort de communication, comme un “élément de confiance“, selon les mots mêmes du président de la République, aux ministres qui ont signé les 41 décrets d’exception pour “protéger“ leur administration. Dans toute cette affaire, c’est la parole de l’État qu’on affaiblit. Depuis le début du quinquennat, quatre titulaires ministériels se sont succédé sur la réforme de l’État et la simplification, mais pour quel résultat ?

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