« Dans le noir, avoir de bonnes jumelles ne sert à rien. Le secteur financier, dont la logique est pourtant fondée sur l’information, baigne dans une opacité extrême. » Il faut donc réguler l’économie par une meilleure information et un accès plus large aux données : c’est la thèse du livre d’Augustin Landier et David Thesmar, brillants jeunes économistes français. Dans cet ouvrage, LA SOCIETE TRANSLUCIDE, sous-titré, Pour en finir avec le mythe de l’Etat bienveillant (Editions Fayard), les deux auteurs appellent à une libération de l’information économique, et pas seulement macro. Pour eux l’ouverture est la clé du dispositif de surveillance par les experts extérieurs, c’est l’antidote aux illusions de groupe et à la capture des gardiens du secret par les intérêts privés. L’Etat moderne doit favoriser cette information, dans ce que Augustin Landier et David Thesmar appellent une architecture ouverte, par analogie à l’écosystème des logiciels libres.
Pour arriver à cette recommandation, les auteurs nous délivrent une passionnante leçon d’économie politique en décrivant les biais et effets pervers qui sont autant de cas d’école pour l’intervention publique. L’enfer est pavé de bonnes intentions. Les auteurs analysent les processus d’intervention de la puissance publique ou les mécanismes de régulation et leurs effets. Externalités positives et négatives, efficacité des monopoles publics, risques du paternalisme et du corporatisme, tragédie des petits coûts, tout y passe dans le rappel, toujours bien documenté, des imperfections de l’action publique. Pour échapper à la tyrannie du court-terme et à la multiplication des réformes avortées, Augustin Landier et David Thesmar donnent le mode d’emploi d’une société translucide, autrement dit assez adulte pour sauver notre modèle français. Il n’y a pas de pilote bienveillant aux commandes de l’appareil d’État mais des hommes inévitablement dotés d’intérêts particuliers. Seule une circulation ouverte et organisée des informationset des données permettra un bonne régulation du système.
A lire et à recommander.