La cour administrative d’appel de Paris vient de prononcer un jugement important en condamnant EDF et ERDF à verser 4 millions d’euros au SIPPEREC, le syndicat intercommunal qui est l’autorité concédante pour l’électricité de 102 collectivités d’Île-de-France, desservant plus d’1,7 millions d’usagers représentant 3,4 % de la consommation nationale d’électricité. Depuis 2005, le Comité du SIPPEREC refuse les rapports d’activité annuels d’EDF et ERDF, estimant que les informations transmises au niveau financier sont insuffisantes pour contrôler la qualité du service public de distribution et de fourniture d’électricité et connaître la situation économique réelle de la concession. Commentant ce jugement en répondant aux questions de La Lettre du Secteur Public, Catherine PEYGE, présidente du SIPPEREC et maire de Bobigny, estime que « le SIPPEREC n’avait pas les moyens de contrôler l’entreprise délégataire et d’évaluer le niveau de ses investissements ». La décision de la cour administrative d’appel va encourager les élus locaux à reprendre la main pour rééquilibrer la relation autorité concédante-concessionnaire. Les collectivités territoriales sont propriétaires des réseaux de distribution, et l’entreprise publique nationale avait tendance à l’oublier. Il y a quelques mois, la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes a d’ailleurs reproché à la ville de Lyon, dans une lettre d’observation, de ne pas assez exercer sa mission de contrôle sur son délégataire EDF.
À l’heure du grand Débat national sur la Transition Energétique (DNTE), des élus locaux français se déclarent en faveur d’une plus forte décentralisation énergétique. En mars 2011, Alain Rousset, président de l’ARF (Association des régions de France) écrivait au Premier ministre, François Fillon, pour lui faire part de son analyse : « L’examen des modèles énergétiques des grands pays industrialisés montre que l’énergie nucléaire est particulièrement développée dans les pays de tradition centralisée avec un État fort qui a longtemps dirigé ou pèse encore fortement sur la politique industrielle (France, Suède, Royaume-Uni, Japon ou encore Chine). A contrario, les énergies renouvelables sont nettement plus développées dans les États fortement décentralisés dont le modèle économique repose sur un tissu de PME dynamiques (Allemagne, Espagne, Italie) ». Avec 7% de l’énergie produite en France provenant d’une source d’origine renouvelable et un objectif de 20% en 2020 fixé par le Grenelle de l’environnement, le président de l’ARF proposait au gouvernement de s’appuyer sur les régions. Les communes françaises ont aussi redécouvert leur compétence énergétique, notamment lors de grandes pannes sur le réseau national en février 2010 quand près d’un million de foyers ont été privés d’électricité pour cause de tempête. La politique de maintenance du groupe EDF, et de sa filiale ERDF gestionnaire du réseau de distribution, a été contestée par les collectivités locales, propriétaires des réseaux de distribution d’électricité basse et moyenne tension. Ces collectivités propriétaires sont réunies dans des syndicats locaux d’électrification (souvent départementaux) aussi puissants que discrets, qui ont permis l’électrification de l’ensemble du territoire français depuis les années trente. Pendant des décennies, EDF a été le seul pilote de l’électricité en France, opérateur et planificateur, la vie des syndicats se résumant aux assemblées générales annuelles. Depuis la libéralisation de l’énergie, les élus locaux se sont rappelés qu’ils sont propriétaires des réseaux et ils ont des impatiences vis à vis du concessionnaire.
Energie girondine ou énergie jacobine ?
Pour l’Association Française Indépendante de l’Électricité et du Gaz (AFIEG), Christophe Droguère observait récemment que « dans le modèle centralisé, adopté par la France depuis plus de quarante ans, l’offre guide la demande, autrement dit la production guide la consommation. Dans le modèle décentralisé, un changement radical de vision énergétique s’opère. Ce modèle part de l’analyse de la demande, soit la consommation d’énergie, sur laquelle les efforts se concentrent pour la réduire par le biais d’outils innovants d’efficacité énergétique, ou en encourageant des comportements individuels et collectifs tendant à la sobriété énergétique. Après avoir agi sur la consommation, on commence par localiser la production sur le lieu de consommation (panneaux solaires, géothermie…), puis à l’échelon du territoire proche (éolien, biomasse, hydroélectricité, cogénération) et, enfin, pour équilibrer les besoins supplémentaires, des centrales thermiques ou nucléaires peuvent être mises à contribution. » Ce modèle décentralisé encourage aussi les gestionnaires de réseaux à développer des smart grids. On en parlera le 18 juin à l’occasion d’Innovative City Convention à Nice. Il serait bon qu’on parle aussi davantage de décentralisation énergétique dans le grand Débat National sur la Transition Energétique.
Il faut générer une véritable croissance énergétique durable. La transition énergétique est sensée avoir commencée mais les chiffres sur l’origine de la production énergétique française montrent le contraire ! (chiffres trouvés sur http://www.fournisseur-energie.com )
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