Que faut-il retenir de l’examen du projet de loi NOTRe qui vient de s’achever à l’Assemblée nationale ? Comme prévu, les départements ont préservé leurs prérogatives et les députés ont confirmé les modifications déjà introduites par les sénateurs. De même, les exceptions sont multipliées pour maintenir sous le seuil de 20.000 habitants un nombre très important de communautés de communes et d’agglomération. Les députés ont toutefois bougé le curseur en faveur de l’intercommunalité au sein du bloc communal et ils ont agité un chiffon rouge en votant une disposition qui prévoit qu’une loi prochaine devra instituer le suffrage universel direct pour l’élection des conseillers communautaires. L’Association des maires de France ne s’y est pas trompée qui dénonce un affaiblissement programmé de l’échelon communal. Le texte va maintenant repartir au Sénat et Philippe Bas, président de la commission sénatoriale des lois prévient que « le Sénat veut remettre d’aplomb une réforme mal engagée par le gouvernement ».
La seule mesure hardie est venue d’un amendement des députés Carlos da Silva (PS, Essonne) et Estelle Grelier (PS, Seine-Maritime) qui prévoit le transfert aux intercommunalités des compétences sur l’eau d’ici fin 2017, transfert qui pourrait aussi concerner les politiques de traitement des déchets. Aujourd’hui, la gestion de l’eau et de l’assainissement est assurée par près de 35.000 services dont la Cour des comptes a dénoncé, à plusieurs reprises, la dispersion, l’hétérogénéité et la complexité. En 2014, on recensait 13.392 syndicats intercommunaux agrégeant un budget global annuel de 17,8 milliards d’euros dont plus de 9 milliards de fonctionnement et mobilisant 65 000 agents, soit le tiers des effectifs des intercommunalités. Pour les deux députés, ces syndicats “interviennent dans une multitude de domaines, bien au-delà des seules compétences de réseau (eau, électricité, gaz, chaleur) et forment un ensemble extrêmement complexe et opaque“. Ils ont demandé aussi “la suppression de la possibilité de désignation de personnalités qualifiées dans les syndicats intercommunaux, dans le respect de la démocratie locale et du choix des électeurs“ et “le remplacement des indemnités perçues par les délégués syndicaux, qui siègent au second degré au titre de leur mandat municipal ou communautaire (notamment lorsqu’il est indemnisé), par un simple remboursement de certains de leurs frais (transports) ainsi que la fixation à compter de 2020 du montant maximum des rémunérations accessoires attribuables aux personnels des syndicats intercommunaux.“ Pour tenir compte de la réalité des petites communes, les députés ont adopté un amendement du Jean Launay (PS, Lot) prévoyant un mécanisme pour garantir la pérennité des syndicats organisant le service public d’eau potable ou d’assainissement sur un territoire chevauchant le périmètre d’une intercommunalité à fiscalité propre. L’entrée en vigueur de la prise de compétence obligatoire par les intercommunalités de l’eau a été repoussée au plus tard au 31 décembre 2017, le gouvernement justifiant ce report par « des particularités (enjeux sur le transfert du patrimoine avec la question des canalisations et des unités de traitement, réflexion sur les points de captages d’eau, etc) ». Même report pour l’assainissement, via un amendement du rapporteur.
Faisant le bilan de cette première lecture du projet de loi à l’Assemblée nationale, Marylise Lebranchu a mis en exergue cette disparition programmée des syndicats intercommunaux qui constituera selon la ministre “une source d’économies importante“. Elle y voit un “ gisement de plusieurs milliards d’économies“.
Illustration : intervention en séance du député Carlos Da Silva qui a rajouté au projet de loi NOTRe la suppression des syndicats intercommunaux