Un réveil en deux temps : dès le mois de mars, la Banque centrale européenne va engager des rachats massifs d’emprunts publics d’État pour réorienter les financements puis, en juin prochain, le plan Juncker sera opérationnel pour accélérer les investissements structurants. Tout est fait pour relancer la machine économique sur le vieux continent et on se demande si les collectivités locales françaises seront au rendez-vous de cette relance de l’investissement, elles qui portent l’essentiel de l’investissement public civil de notre pays. Mercredi 21 janvier, lors la journée annuelle des finances locales de l’AdCF (Assemblée des communautés de France), l’ancien maire de Tourcoing Michel-François Delannoy a levé un coin du voile sur les résultats d’une mission qu’il vient d’achever pour la Caisse des dépôts sur l’investissement des collectivités locales. Trois tendances se dessinent : stratégie de territoire avec maintien radical de l’investissement pour le développement économique local, stratégie d’ajustement avec une baisse de 20 à 30 % des investissements par rapport au point haut du précédent mandat, et attitude de repli et de renoncement. Pour Michel-François Delannoy, l’attitude de repli est essentiellement “due à la difficulté à appréhender la période complexe et incertaine que nous vivons“. Outre le contexte local et la baisse des dotations, “on constate de grandes inégalités entre territoires, entre ceux qui maîtrise l’expertise et l’ingénierie de projet et ceux qui sont très faibles dans la programmation et ne savent pas challenger leurs projets“, constate-t-il avant d’ajouter : “s’il y a un investissement à faire en ce moment, c’est d’abord celui de l’expertise et de l’ingénierie qui doit apporter l’agilité dans le montage des projets et leur financement. C’est la clé pour soutenir l’investissement public local demain“.
Il faut renforcer la culture économique des décideurs territoriaux. À partir de juin, ils pourront utiliser les financements ouverts par le Plan Juncker avec son mécanisme de dette subordonnée qui permet aux investisseurs de limiter le risque associé aux projets d’investissement. Rien à voir avec un système de fonds tels qu’on les connaît dans la politique européenne de cohésion, Cette fois, Bruxelles va intervenir directement avec des participations dans des sociétés de projet pour accompagner les entreprises et les maîtres d’ouvrage. On n’est plus dans la logique de subvention, les responsables territoriaux vont devoir créer des véhicules pour porter leurs réalisations, des sociétés de projet ou des entreprises publiques locales. “Tout projet, pourvu qu’il rencontre un objectif de l’Union européenne, sera éligible, mais il faudra qu’il apporte la preuve de sa viabilité, de sa capacité à se rembourser“, analyse Laurent Ménard du Commissariat général à l’investissement. Là encore il faudra faire preuve d’agilité pour retrouver le goût d’investir.