Lire la ville aujourd’hui

 

lireÀ la veille du Salon du livre de Paris et du premier tour des élections municipales, je vous propose une sélection de publications récentes sur les villes et le fait urbain particulièrement novatrices.

LA GUERRE DES VILLES A DÉJÀ COMMENCÉ. Derrière ce titre martial, la Nouvelle Revue Géopolitique propose un dossier passionnant sur le fait urbain. il s’agit plutôt de voir ce qui assure la réussite des villes mondiales, les “global cities“ comme Paris, Londres, Hong-Kong ou Rio. À côté de villes comme Detroit qui a perdu plus de la moitié de sa population en 30 ans, de nouvelles métropoles émergent qui réunissent les centres décisionnels et économiques. “L‘attractivité d’une ville peut se mesurer grâce à un chiffre d’or, produit de trois facteurs, la puissance morale, la puissance économique et la puissance d’intégration“, écrit Laurent Vronski.

geopol

On assiste partout dans le monde à un retour des habitants vers les centres-villes et un moindre attrait pour les banlieues. Ce retour suscite de nouveaux défis d’organisation. Dans les pays émergents, la question de l’énergie devient centrale. Au sud, des métropoles émergent sans développement des campagnes et en l’absence d’une bonne gestion des externalisations négatives. Comme l’a remarqué Edward L. Glaeser, la possibilité d’importer des denrées alimentaires depuis l’étranger avantage un modèle macrocéphal autonome pour ces nouveaux ensembles urbains. Cette urbanisation des pays pauvres présente un paradoxe, la croissance de ces villes ne s’appuie plus sur le développement économique des campagnes et sur des administrations fortes.

villes

LES VILLES AU SECOURS DE L’ÉTAT. L’urbaniste Jean Haëntjens envisage la ville comme espace de solutions politiques. Dans son dernier ouvrage, Les villes au secours de l’Etat (FYP Editions),  il développe une pensée foisonnante et stimulante sur l’évolution urbaine dont il faut recommander la lecture à tous ceux qui s’intéressent à la gestion locale. L’auteur fait partie de ce courant qui place aujourd’hui la ville avant l’Etat comme espace de solutions modernes pour l’action publique. Il ne s’agit pas d’un nouveau dogme béat mais d’une analyse très étayée du fait urbain dans un monde où la population des villes ne cesse d’augmenter. “Dans l’imaginaire collectif, le projet urbain a remplacé depuis longtemps le projet de société“, constate Jean Haëntjens, “pour le citoyen lambda, le vrai choix se situe plus entre ses options résidentielles qu’entre ses options politiques.“ Pour lui, les villes sont passées d’un rôle de voitures-balai du développement à celui de “laboratoire d’innovation sociétale“. Tout le propos du livre est justement de montrer cette innovation à l’œuvre sur les territoires urbains.

Comment passer de la ville fracturée à la ville incluante ? Par des stratégies multi facteurs (mobilité, logement…) et l’auteur compare les responsables urbains à des acupuncteurs qui cherchent les points sensibles qui vont permettre de faire évoluer le système. Car il s’agit bien d’une action systémique. Dans cette ville innovante, la prise de décision est collaborative, y sont associées toutes les parties prenantes à l’économie locale et à la cohésion sociale. Dans ces systèmes urbains, on redécouvre les circuits courts, l’économie circulaire et sociale tient une place importante. Dans cette ville productrice et consommatrice, la maîtrise de la transition  énergétique est essentielle. L’auteur cite le cas  du Danemark dont le projet national “énergie 100 % renouvelable en 2050“, repose sur un partenariat qui donne une place centrale aux villes et à la décentralisation énergétique.

Partout dans le monde, c’est désormais la façon dont les territoires et les villes sont organisés et reliés qui détermine, pour partie, la capacité d’une nation à créer des richesses. L’auteur remarque que les Etats  redécouvrent actuellement l’intérêt de métropoles intermédiaires (1 à 3 millions d’habitants) qui permettent de concilier une visibilité internationale avec une échelle qui reste humaine, des prix immobiliers raisonnables et la possibilité d’une gouvernance locale fondée sur la proximité. Leçon utile pour notre pays.

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COMMENT RENDRE LA VILLE PLUS INTELLIGENTE ? Quand on parle de la ville aujourd’hui, elle ne peut être que “smart“.  Efficace, innovante, participative : comment rendre la ville plus intelligente ? C’est le titre d’un rapport récemment édité par l’Institut de l’entreprise. Ce rapport très pédagogique est issu de l’« Atelier de la Performance publique », commission de l’Institut présidée par Augustin de Romanet et dirigée par Julien Damon. Les démarches et services développés localement au nom de la “ville intelligente“ peuvent aider les municipalités à réduire leurs dépenses, tout en contribuant à l’amélioration de la qualité de service. Les auteurs rappellent que la smart city dépasse une gestion du service urbain historiquement organisée en silos pour privilégier une approche en réseau, dans laquelle l’utilisation des ressources numériques devient essentielle. S’appuyant sur de nombreux exemples internationaux et tenant compte des spécificités françaises, le rapport de l’Institut de l’entreprise énonce 10 propositions, illustrées par des exemples réussis, pour permettre l’avènement de véritables smart cities en France. Tout en plaidant pour l’émergence de métropoles intelligentes, ce rapport nuance cependant une approche trop idyllique de la smart city, en intégrant dans son analyse les limites inhérentes à cette dynamique. L’ouvrage s’achève de façon originale avec le programme “smart“ d’un candidat aux élections municipales de 2014 et deux courts récits de science-fiction appliqués à la smart city de 2040, scénarios de rêve et de cauchemar, écrits par Julien Damon.

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LA VIE RÊVÉE DES MAIRES. Pour piloter ces villes, des citoyens se présentent aux élections municipales. Devenir maire : Sacerdoce enchanté ou enfer programmé ? C’est le sous-titre du livre La vie rêvée des maires (Éditions de l’Aube)  de Bénédicte Boyer. L’auteure connaît bien son sujet et elle brosse un portrait très juste des maires de France dans la diversité de leur collectivité territoriale. Elle a mené un travail d’enquête minutieux, allant à la rencontre d’élus locaux et élues locales qui explique la réalité de leur mandat politique. “ En 30 ans de décentralisation, la fonction a évolué tout autant que le contexte et les conditions d’exercice du mandat sont de plus en plus éloignées du cliché du potetntat local en son royaume“, remarque Bénédicte Boyer. Les témoignages de maire sont éloquents : disparition des formes spontanées de respect, personnalisation de la fonction, sens de l’intérêt général.

Pour savoir si on est fait pour cette responsabilité de maire, trois mots sont proposés et résument bien les qualités nécessaires à la mission : gérer, écouter et rêver. Ce dernier mot est certainement le plus ambitieux, il invite les élus à avoir une vision pour leur territoire, la capacité à anticiper au service du développement local.

 

Je vous donne rendez-vous Porte de Versailles à Paris, au Salon du livre, vendredi 21 mars à 14 h, Stand S64,  pour une table ronde organisée avec la revue Géopolitique Africaine sur le thème « Comment s’organisera la ville africaine, métropole de demain », que j’animerai. Jean Haëntjens participera à ce débat. 

 

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